Jeudi 23 mai 2013 à 16:08

 

La Grammaire est une Chanson Douce, Erik Orsenna.

 

Certains livres ont ceci de merveilleux qu’ils nous enchantent. Ce livre d’Erik Orsenna est né de son mal-être face à ce que ses enfants apprenaient à l’école, au collège, les éloignant des classiques de la grammaire, ces mêmes classiques qui permettent aux uns et aux autres d’écrire correctement la langue.

J’ai découvert cet ouvrage en lisant un livre tout aussi intéressant mais beaucoup moins romancé traitant du système éducatif français (et n’allez pas dire que je dois sacrément m’ennuyer pour lire ce genre de choses, parce qu’en fait, c’est juste que ça commence à m’intéresser un peu), L’imposture Scolaire, un livre d’Alain Planche. Je suis allée chercher des références et de fil en aiguilles, parce que Mollat c’est le mal, je suis tombée sur ce livre d’Erik Orsenna.

N’allez pas croire, La Grammaire est une Chanson Douce n’est pas un assommant précis de grammaire. Non, ce livre raconte une histoire d’amour. Une histoire d’amour entre un homme et la grammaire, entre une petite fille et les mots. J’en ai eu les larmes aux yeux.

 

Si Jeanne et son frère Thomas ont perdu leurs mots après un puissant naufrage qui entraîna leur bateau par le fond, il n’en reste pas moins qu’ils pourront faire confiance à Monsieur Henri et son séduisant neveu pour partir à la conquête de leurs mots, pour charmer ces étranges créatures qui ne sont pas de simples outils, mais bel et bien des entités pourvues de caractère et de charme…

 

À travers ce livre et cette histoire pour laquelle je n’ai cessé de sourire, on se plonge dans la construction de la phrase en toute simplicité.



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Mon passage préféré est celui de la quatrième de couverture, alors, je vous l’offre :

 

« Elle était là, immobile sur son lit, la petite phrase bien connue, trop connue : je t’aime.

Trois mots maigres et pâles, si pâles. Les sept lettres ressortaient à peine sur la blancheur des draps.

Il me sembla qu’elle nous souriait, la petite phrase.

Il me sembla qu’elle nous parlait :

— Je suis un peu fatiguée. Il paraît que j’ai trop travaillé. Il faut que je me repose.

— Allons, allons, Je t’aime, répondit Monsieur Henri, je te connais. Depuis le temps que tu existes. Tu es solide. Quelques jours de repos et tu seras sur pied.

Monsieur Henri était aussi bouleversé que moi. Tout le monde dit et répète « Je t’aime ». Il faut faire attention aux mots.

Ne pas les répéter à tout bout de champ. Ni les employer à tort et à travers, les uns pour les autres, en racontant des mensonges. Autrement, les mots s’usent. Et parfois, il est trop tard pour les sauver. »

 

En tout cas, je vous invite à aller découvrir ce livre, je l’ai vraiment beaucoup aimé. Il y a un certain sens du choix, dans le mot, une maîtrise exceptionnelle de la construction d’une phrase et ça se ressent dans la puissance de l’écrit. Erik Orsenna sait manier les mots, il les aime, ça se sent, ça se ressent.

Mardi 2 avril 2013 à 20:35

 

Contrairement à la trilogie de Valisar, dont le deuxième tome me paraît trop éloigné de ce que Fiona McIntosh a pour habitude de nous livrer, Percheron me promet déjà monts et merveilles avec ce premier tome, dont j’attends la suite avec hâte.

Peut-être est-ce parce que McIntosh m’a habituée à ces cliffhangers que je me prépare déjà pour le 12 juillet 2013 avec une hâte que je me connaissais uniquement pour les Harry Potter. Je crois que j’attends ce deuxième tome avec autant d’empressement que le troisième des Chroniques des Dieux de James Clemens (dont je parlerai ultérieurement).

L’univers développé par Fiona dans cette relativement nouvelle trilogie (juste récemment traduite, en réalité) développe et poursuit le même univers, en prolonge les contours et en repousse les frontières.

C’est quelque chose qui me plaît particulièrement dans la façon dont elle construit ses écrits, avec ses univers qui s’entrecroisent sans cesse, sans doute à différentes époques. Évidemment, le développement des pouvoirs magiques ou même de la trame n’est pour l’instant pas géniale, mais j’aime l’exotisme de ce roman (de la fantasy dans un pays chaud ! Je l’ai lu en plein mois de décembre, ça m’a fait un bien fou).

Mention spéciale pour le côté gore de ce roman. Je crois que même le passage de Valisar où on assiste à du cannibalisme ne valait pas cette merveilleuse scène d’émasculation totale à laquelle on assiste. Un truc qui met bien en joie, en somme. Non, vraiment, j'ai pris un pied tout particulier à assister à cette scène, j'étais même en train de manger. Les p'tits détails m'ont même pas coupé l'appétit, j'ai juste imaginé que c'était mon ex et j'ai éclaté d'un rire sadique et jaloux.

Et puis même cette psychologie des personnages me laisse quelque peu impatiente de voir la suite (dieux que c’est compliqué de faire une critique de livre sans spoiler tout le monde. C'mieux les critiques de livre sérieux. Tu dis "Je suis nulle dans ce domaine, mais quand même, je donne mon avis sans avoir l'air d'y toucher"). En somme, c’est pas encore à la hauteur des livres de James Clemens, mais encore quelques années et elle aura enfin trouvé sa place dans ce monde.

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Jeudi 28 mars 2013 à 16:00

Capitalisme et pulsion de mort : la critique d'une néophyte aussi économiste que sa grand-mère en short.

 

 

Pour la critique de ce chassé-croisé entre les œuvres de John Maynard Keynes et Freud, je ne m'aventurerai pas à commenter l'analyse dressée par Gilles Dostaler et Bernard Maris : n'étant nullement compétente pour ça, je laisserai à chacun le soin d'y accoler sa vision de l'œuvre.

« Mais Temi, si t'es pas économiste et que tu comptes pas en faire une critique, pourquoi t'as lu ce livre ? Et pourquoi tu en parles ? »

Deux excellentes questions, ma foi. Pour répondre à la première, je l'ai lu parce que mon professeur de culture économique l'a évoqué et que je lirai même Boule & Bill pour un peu qu'il affirme que ça m'apportera quelque chose. Pas que je lui voue un culte, à ce prof, juste que j'ai foi en son jugement et qu'il sait de quoi il parle. Effectivement, cet ouvrage m'a apporté beaucoup.

Il n'est pas facile à lire – il m'a fallu presque une semaine et demi pour avaler les cent pages de cet essai – et je devrais probablement le relire aux lumières d'une réflexion plus posée, pour être certaine d'avoir tout assimilé, tout compris. Je n'en dresserai même pas de résumé, ce serait une gageure et je n'ai pas envie de prendre le risque de commettre des impairs en racontant ce qui ne peut être raconté.

Ce condensé de pensées est cependant rondement mené par ses deux auteurs. Je n'en dirai pas autant du travail du maquettiste qui a vraiment mal travaillé. Entre doubles espaces et défauts flagrants de mise en page, il est certain que ce n'est pas pour la beauté de l'objet que je le recommanderai. Bien entendu, ceux qui lisent ce genre de livres ont très peu de notions de la typographie et le confort de lecture peut passer un peu à la trappe. Toutefois quand le texte est déjà quelque peu ardu, si en plus la mise en page arrache les yeux des avertis, ça peut en rebuter plus d'un. Passons. Là n'est pas l'objet de cet article.

J'admire les liens tissés entre toutes les pensées – de la philosophie à l'économie en passant par la littérature et la sociologie –, j'admire la brillante et magistrale analyse. Les néophytes, comme moi, peuvent arriver à lire ce livre en s'accrochant aux branches et je ne doute pas que les spécialistes ont dû se régaler. Moi-même j'ai pris beaucoup de plaisir à le lire. À défaut d'être divertissant – aucun ouvrage spécialisé ne peut être divertissant – il fut profondément instructif. Et bien plus attrayant que n'importe quel « Que sais-je » des éditions PUF.

J'admire, également, le jeu des deux auteurs, qui s'amusent bien, je vous assure, à jouer avec nos nerfs, surtout sur la dernière partie. Tout ce qui est contemporain est déjà source d'angoisse pour les lecteurs.

Il y a quelques mois, Livres-hebdo faisait état d'un regain d'intérêt pour les ouvrages historiques, tout autant que pour les témoignages actuels. Cette contradiction extrême, entre attrait d'un passé en forme de bon vieux temps et besoin morbide de se rappeler combien ça va mal, Dostaler et Maris ont su l'exploiter à merveille. Retraçant d'abord les pensées de Keynes et Freud, principalement dans leurs points communs – la préférence pour la liquidité, liée à la pulsion de mort, tout ceci, ils l'expliquent avec un brio déconcertant –, se plaçant là dans le « passé en forme de bon vieux temps » comme dit plus haut. Puis, petit à petit, ils s'orientent sur l'aspect contemporain de ces œuvres, principalement de Keynes, évoquant Jérôme Kerviel (moi je l'aime bien, Jérôme Kerviel, il est beau (attachement subjectif et totalement indépendant de ses actes bien entendu)), la Société Générale, la crise qui ronge les esprits, participe de la montée des extrêmes qui s'en servent sans vergogne pour justifier leurs idéaux bancals.

Après nous avoir fait plonger dans un océan de pessimisme, ils nous apportent quelques éclaircies, pour mieux nous faire douter, pour mieux nous faire plonger. Et finalement, cette question, cette ouverture qui est aussi bien pessimiste que du plus grand optimisme, qui peut être un appel au secours comme un message d'espoir... Non franchement, ils jouent finement. Ces essayistes, en nous plongeant ainsi dans un tumulte de questions qui s'entrechoquent et se heurtent, forment des étincelles de réponse qui ne s'embrasent pas.

 

Et si finalement, c'étaient eux ? S'ils étaient ce début d'ouverture, s'ils étaient – pardonnez la comparaison bancale – l'agrafeuse qui contient les agrafes permettant de fixer les paupières et empêchant les individus de fermer les yeux ?

 

Je commente ce livre comme un roman, parce qu'il est bâti comme tel. Un épilogue, un prologue, une fin ouverte qui appelle une suite… Avouons-le, Dostaler et Maris ont pris bien du plaisir à écrire ce livre. Ça se sent. La préface le sous-entendait et je le confirme.

Et quoi de plus plaisant que lire quelque chose qui a été fait avec amour, avec amusement ? C'est comme l'apprentissage. On retient mieux quand la personne qui nous apprend des choses aime ce qu'elle fait.

 

Ce que j'ai retiré de ce livre, outre le fait que faire des choses avec le sourire c'est cool (ce que je savais déjà, bien entendu), c'est la complexe imbrication de chaque élément. Combien de fois ai-je dit ou pensé « hey ! Mais ça, je l'ai vu en cours, c'est tel ou tel penseur qui l'a dit ! ». Au final, je ne saurais dire si c'est ce livre qui s'intègre parfaitement dans mes cours ou si ce sont les cours qui sont un bon préliminaire à ce livre.

 

 

[prochaine critique de livre sérieux : un jour, peut-être, si j'ai la foi de relire « Le bizutage » de René de Vos]

Samedi 16 mars 2013 à 13:53

 La femme de nos vies, par Didier van Cauwelaert.



Après quelques ouvrages un peu décevants, comme Double Identité où je n’ai pas reconnu le style de mon auteur favori, je n’ai pas pu m’empêcher de me précipiter pour acheter La Femme de nos vies, dès que j’ai pu.

J’ai retrouvé mon brillant Didier van Cauwelaert, cette plume extraordinaire, tant par son ironie cynique que par son talent à nous inviter à prendre place à ses côtés pour suivre le fil de ses personnages.

Le thème était risqué. Il a su mener sa barque avec brio, avec talent et je lui pardonne, grâce à cet ouvrage, ses légères baisses de régime dans les précédents, comme s’il se réservait pour nous offrir cette merveille.

Ce livre se laisse lire, même s’il traite d’un sujet dur, même s’il y a des détails qui donnent envie de détourner les yeux. Je me suis plongée avec une exaltation non feinte dans l’univers de David, le héros, les héros.

La femme de nos vies me laisse comme souvent émerveillée, avec cette sensation qu’une fois de plus, van Cauwelaert se livre dans ses mots.

Ce qui est étrange, c’est que je ne parviens pas à lui reprocher ce que je reproche à Lévy, c’est-à-dire le récit au présent. Peut-être est-ce pas que ce récit est construit comme un dialogue, un dialogue unilatéral, nous n’apercevons Marianne et ses répliques qu’au début, qu’à la fin. Le reste, c’est une reconstitution d’un passé jamais vraiment révolu.

Bien sûr, le texte a ses défauts. Quelques maladresses, parfois. Mais il compense par son brio, ses citations toujours plus belles, toujours plus fortes.

 

En résumé, grâce à cette production, Didier van Cauwelaert m’a reconquise, et même plus encore. Ce livre se place dans le top 3 de mes ouvrages préférés de lui, avec Cheyenne et Le père adopté, détrônant l’Évangile de Jimmy.

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[Prochaine critique : Odalisque, de Fiona McIntosh]

Mardi 3 avril 2012 à 19:59

 « Il songea à cette malheureuse fille qui l’avait perdu et qu’il avait perdue »
Victor Hugo



C'est avec une joie non feinte que je me délecte de me plonger et d'apprendre à découvrir Victor Hugo le romancier, moi qui ai toujours profondément adoré et vénéré Victor Hugo le poète. Je m'attèle donc d'entrée de jeu à quelque chose de massif, en m'attaquant à Notre Dame de Paris, sur les conseils de
Nyx. Et je ne suis pas déçue. Pas le moins du monde. À peine au début, je me laisse déjà envahir par les vertiges des bons auteurs bien de chez nous et je commence à me dire que Nyx avait raison : la littérature est morte en même temps que tous ces auteurs, elle avait raison.

Je ne suis pas du genre à aimer critiquer et ceux qui m'ont lue jusqu'à ont pu constater que je ne suis pas très positive, ces derniers temps, dans les lectures qu'on me conseille. Il était temps que je rétablisse la vérité. J'aime certains livres, j'encense certains films et je ne suis pas tout le temps en train de dire du mal des gens. Victor Hugo est mort depuis Belle Lurette, mais ça n'empêche pas que sa lecture reste quelque de toujours aussi plaisant pour moi. Je n'avais aimé, auparavant, que ses Contemplations – et ses Châtiments –, sublimes morceaux de poésie, qui faisaient soupirer d'un bonheur infini.

Je viens à peine de débuter la lecture de Notre Dame de Paris – en parallèle aux Chevaliers d'Émeraude, le dernier conseil de ma belle-sœur, dont je parlerai dans quelques jours, quand je l'aurais fini – et je suis déjà enchantée, et les dieux savent combien je peux être désenchantée quand le cœur m'en dit. Oh oui, je ressens au plus profond de mon être le désarroi de l'homme que je suis à travers Paris, je n'ai pas besoin de fermer les yeux pour me laisser emporter dans ses folles descriptions, qui ne m'ennuient pas et me font rêver.

J'ai hâte. J'ai hâte de me plonger dans la suite, et pas une seule seconde je n'ai pensé à Garou, Fiori et les autres en commençant ce roman – une de mes craintes initiales, j'en ai peur –, ce roman, que dis-je, ce chef-d'œuvre intemporel ! Je suis obligée de me retenir, pour laisser durer le plaisir, et aussi parce que je ne raffole pas des livres électroniques, il serait temps que j'aille m'inscrire à la bibliothèque.

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