[Promis, juré, craché]
Je n’ai pas réussi à tenir parole.
Une acidité certaine me brûle la gorge alors que je réalise que je ne suis qu’une égoïste qui en demande trop. J’ai été déçue par mon anniversaire, comme chaque année, comme à chaque fois. Je ne vois même pas pourquoi je m’entête.
Dans l’océan de ma déception, j’en veux aux gens que j’aime de n’avoir pas su m’offrir une fête à la hauteur de ce que j’attendais.
C’est peut-être trop demandé, mais je pensais valoir plus que ça. Je n’avais pas invité Aurélie parce que je sais pertinemment qu’elle serait venue. C’est un peu masochiste, mais je voulais me prouver que mes potes bordelais seraient de la partie, qu’il y aurait du monde sans que je n’aie à aller chercher mes amies qui habitent l’autre bout de la France. Je voulais me prouver que je n’avais pas besoin d’Aurélie et de ses cadeaux, de ses attentions, de son adorable gentillesse pour passer une bonne journée.
Peu de gens sont venus. Trop ont annulé au dernier moment. Pourtant, j’avais opté pour des valeurs sûres.
Je ne remercierai jamais assez ceux qui ont fait le déplacement – Sid, l’éternelle, Jérémy, toujours présent, Jim – mais je me sens quand même déçue de voir que je compte si peu.
Le pire, ce sont ceux qui me disent « Non mais je serai là pour l’anniversaire de ton copain ! ». Ça me fait une belle jambe, tiens. Et ça me donne encore plus l’impression de ne pas être aimée.
Bon, je savais déjà que je n’étais pas un parangon de sociabilité mais ce n’est peut-être pas une raison pour me le remettre dans la face comme ça. Mon copain et moi sommes peut-être nés le même mois, mais son anniversaire c’est son anniversaire et le mien, c’est autre chose, une autre occasion, une autre fête. Une fête ratée.
Je n’ai même pas soufflé de bougies. Comme si c’était un jour comme les autres, personne n’a pensé à les sortir. Je suis tellement déçue. Tellement triste.
Oh, je n’en veux pas à ceux qui ne pouvaient pas venir et qui m’ont prévenue des semaines à l’avance. Quand une amie blessée me dit « Je ne peux pas me déplacer », je ne peux pas décemment lui en vouloir de ne pas venir. Quand son copain me dit « Je ne veux pas venir sans elle, alors qu’elle a vraiment envie de venir. », je pardonne parce que c’est mignon, charmant et plein d’attention délicate.
En fait, je voulais être une princesse, pour cette année-là, cette dernière année où j’aurais pu fêter mon anniversaire sans avoir peur de me voir vieillir, la dernière année de ma jeunesse, avant que ma vie d’adulte ne me nargue. Parce que l’année prochaine, ce seront mes 25 ans que je fêterai. Et mes parents commenceront à s’inquiéter pour mon avenir, ils se diront qu’il est temps que je sois stable, que je sois casée, mariée, des enfants. C’était ma dernière année de jeunesse et même cette occasion n’a pas suffi à faire que je sois heureuse de fêter mon anniversaire.
J’aurais voulu qu’on me dise « Non, aujourd’hui, tu ne fais rien, c’est toi la reine. » Je n’ai même pas eu cet honneur.
J’aurais voulu que les regards convergent vers moi et aimer qu’on me porte de l’attention, juste une journée, avant de replonger dans l’anonymat rassurant d’une vie plate et banale, comme celle que je mène.
Mais tant pis, je suppose. Je vais prendre sur moi et sourire, tant et si bien que personne ne verra que je vais mal, que je suis triste et que des larmes amères roulent sur mes joues.
Et putain, je vais m’y tenir à cette promesse que je me fais : mon anniversaire n’existe plus, c’est fini. J’en ai marre de tenter de renverser les choses et de me reprendre dans la gueule des évidences que je ne peux ignorer. Plus jamais. Plus jamais je ne veux vivre une telle déception.
Je retiens la leçon : c’est trop demandé d’être la reine pendant une journée. C’est trop demandé.
[Je jurai un peu tard qu’on ne m’y prendrait plus.]
Fond sonore : La Dolce Vita – Zazie